• Oct 26, 2025

Oral de Concours : La règle qui transforme la panique en 17/20 (La Méthode P.R.O.C.)

L'oral du concours. Vous êtes assis face au jury. La salle est silencieuse. Après quelques questions de parcours, vient LA question. Celle que vous n'aviez pas préparée. Celle qui touche à une actualité obscure ou à un point technique de droit que vous n'avez pas révisé.

Votre cœur s'accélère. Votre cerveau se fige. Un "brouillard total". Vous avez le sentiment que trois secondes de silence vont vous faire passer pour un ignorant.

En tant que Directeur des Ressources Humaines dans la fonction publique et formateur depuis de nombreuses années, j'ai vu cette scène des centaines de fois. J'ai vu des candidats brillants, avec des dossiers écrits exceptionnels, perdre tous leurs moyens et "bafouiller" une réponse médiocre. Ils se justifient, s'excusent, et perdent en quelques secondes le capital confiance qu'ils avaient bâti. La différence entre un 7/20 éliminatoire et un 17/20 qui vous ouvre les portes de la carrière se joue souvent ici.

Le problème n'est pas la question piège. Le problème, c'est notre réaction à la panique. Nous passons en mode "survie", et en mode survie, nous ne réfléchissons plus : nous réagissons. Et nous réagissons mal.

Et si je vous disais qu'il existe un protocole mental simple pour reprendre le contrôle ? Une méthode pour forcer votre cerveau à quitter le mode "panique" et à réactiver le mode "logique" ? C'est ce que j'appelle la méthode P.R.O.C. Ce n'est pas une simple astuce, c'est un système.

Le "Brouillard Cérébral" : comprendre la panique pour mieux la vaincre

Ce que vous ressentez, c'est un phénomène psychologique bien connu. Le célèbre psychologue et économiste Daniel Kahneman, prix Nobel, parle de nos "deux systèmes de pensée".

  • Le Système 1 : C'est notre mode "pilote automatique". Il est rapide, instinctif, émotionnel. C'est lui qui prend le dessus en cas de danger ou de stress intense. C'est le système de la panique, le fameux "fight or flight" (combattre ou fuir). Face à une question piège, il crie : "DANGER ! JE NE SAIS PAS !"

  • Le Système 2 : C'est notre mode "logique". Il est lent, analytique, délibéré. C'est notre cortex préfrontal, celui qui est capable de raisonner, de structurer une pensée et de prendre du recul.

Lors d'un oral de concours, le stress de l'évaluation fait sauter le Système 2 et donne les pleins pouvoirs au Système 1. Le résultat ? Vous bafouillez, vous cherchez vos mots, vous répondez à côté.

L'objectif de la méthode P.R.O.C. est simple : elle sert d'interrupteur manuel pour couper le Système 1 (panique) et ré-enclencher de force le Système 2 (logique). Et cela, que vous ayez 5 minutes pour structurer votre plan à l'écrit, ou 30 secondes pour répondre au jury.

La Méthode P.R.O.C. : Votre système anti-panique en 4 étapes

J'ai résumé cette règle en un acronyme simple : P.R.O.C. (pour Processus). Parce que c'est exactement cela : un processus à dérouler méthodiquement lorsque la pression monte.

Étape 1 : P pour PAUSE (Reprendre le contrôle du temps)

Dès que vous sentez la panique monter, la toute première chose à faire est... RIEN.

N'écrivez rien. Surtout, ne dites rien. Ne laissez pas le Système 1 sortir la première réponse venue.

  • À l'écrit : C'est facile. Vous êtes face à un sujet de dissertation ou de note de synthèse qui vous paralyse. Posez votre stylo. Buvez une gorgée d'eau. Fermez les yeux 5 secondes. Prenez deux ou trois grandes inspirations (la technique de la "respiration carrée" est excellente pour cela). Vous venez de casser le cycle de la panique.

  • À l'oral : C'est plus difficile, mais c'est un "game changer". Le jury vous pose sa question piège. Ne vous jetez pas sur une réponse. Marquez une vraie pause de 3, 4, voire 5 secondes. Regardez le jury calmement. Souriez légèrement.

Pour "acheter" ce temps et montrer que vous n'êtes pas déstabilisé, vous pouvez utiliser une phrase simple :

"C'est une question très intéressante. Permettez-moi une courte seconde de réflexion pour structurer ma réponse."

Contrairement à ce que pensent 90% des candidats, cela n'est jamais perçu comme une faiblesse. Au contraire. Cela montre au jury que vous n'êtes pas un robot qui récite, mais un esprit qui réfléchit. Vous venez de reprendre le contrôle du temps.

Étape 2 : R pour RECADRAGE (Quelle est la VRAIE question ?)

Pendant cette pause, votre cerveau va s'empresser de vous dire : "Je ne sais pas ! C'est un piège ! Je suis nul !". Votre travail est de le recadrer.

Le recadrage consiste à vous poser cette question fondamentale : "Qu'est-ce que le jury cherche vraiment à évaluer en me posant cette question ?"

La réponse est presque toujours la même : le jury ne teste pas (seulement) votre connaissance encyclopédique. Il teste surtout :

  • Votre honnêteté intellectuelle.

  • Votre capacité à raisonner sous pression.

  • Votre aptitude à structurer une pensée.

  • Votre capacité à prendre de la hauteur.

Étude de cas : La question piège

Imaginez que le jury vous demande : "Que pensez-vous du décret 2024-XXX du 15 mars dernier modifiant le statut des attachés territoriaux ?"

Vous n'avez jamais entendu parler de ce décret.

  • Réaction Système 1 (Panique) : "Euh... je... je ne connais pas ce décret en particulier... je n'ai pas eu le temps de... euh..." -> Vous avez l'air d'un candidat qui n'a pas préparé sérieusement.

  • Réaction Système 2 (Recadrage) : (Pause. Puis :) "Je vous remercie pour cette question précise. Je n'ai pas une connaissance détaillée de ce décret spécifique du 15 mars. Cependant, il s'inscrit, je suppose, dans les enjeux plus larges de la gestion des carrières et de l'attractivité de la filière administrative. Sur ce sujet..."

Voyez-vous la différence ? Dans le second cas, vous avez recadré. Vous avez été honnête (qualité essentielle d'un fonctionnaire) et vous avez immédiatement utilisé la question pour démontrer votre capacité d'analyse sur un sujet plus large que vous maîtrisez. Vous avez transformé le piège en opportunité.

Étape 3 : O pour OPTIONS (Devenir le stratège, pas la victime)

Maintenant que le problème est recadré, votre cerveau logique (Système 2) est réactivé. Il est temps de lister mentalement (ou sur votre brouillon à l'écrit) 2 ou 3 options. Pas dix. Juste deux ou trois.

Le simple fait de lister des options vous redonne un sentiment de puissance. Vous n'êtes plus une victime qui subit, vous êtes un stratège qui choisit.

  • À l'écrit : Face à votre sujet de dissertation.

    • Option 1 : Un plan dialectique (Thèse / Antithèse / Synthèse). Risqué si le sujet ne s'y prête pas.

    • Option 2 : Un plan thématique ou analytique (par exemple : Constats / Enjeux / Solutions). Plus sûr.

    • Option 3 : Commencer par l'exemple X que je maîtrise pour en tirer une problématique.

  • À l'oral : Face à la question piège sur le décret inconnu.

    • Option 1 : L'honnêteté + élargissement (la stratégie du recadrage vue plus haut).

    • Option 2 : Tenter de deviner le contenu du décret. (Très risqué !).

    • Option 3 : Raccrocher la question à une expérience personnelle. ("Je ne connais pas ce décret, mais dans mon poste actuel, j'ai été confronté à la mise en œuvre de la réforme Y...")

Étape 4 : C pour CHOIX (L'engagement à 100%)

C'est l'étape finale et la plus importante. Vous avez fait une pause, vous avez recadré, vous avez vos options. Maintenant, choisissez-en UNE. Et tenez-vous-y.

Fini l'hésitation. Fini le "j'aurais peut-être dû prendre l'autre plan". Le pire ennemi de la réussite, c'est l'hésitation à mi-parcours. Un plan "correct" défendu avec 100% de confiance vaudra toujours mieux qu'un plan "parfait" exécuté avec 50% d'hésitation.

Vous avez choisi l'Option 1 (honnêteté + élargissement) ? Parfait. Allez-y à fond. Développez votre réflexion sur les enjeux de l'attractivité avec conviction.

Vous avez choisi le plan thématique à l'écrit ? Parfait. Structurez votre pensée, trouvez vos arguments, et rédigez.

Vous avez fait un choix en pleine conscience. C'est la marque d'un professionnel.

Ce n'est pas une règle de temps, c'est un processus mental

La "Règle des 5 Minutes" porte bien son nom pour l'épreuve écrite. Vous devez prendre 5, voire 10 minutes au début pour appliquer P.R.O.C. et bâtir votre plan. C'est l'investissement le plus rentable de vos 4 heures d'épreuve.

À l'oral, évidemment, vous n'avez pas 5 minutes. Vous avez 30 secondes, tout au plus. Mais le processus mental est le même, juste compressé :

  • (P) Je respire. Je dis "question intéressante". (5 secondes)

  • (R) Il ne teste pas ma mémoire, il teste ma logique. (5 secondes)

  • (O) Option 1 : Honnêteté. Option 2 : Deviner. (5 secondes)

  • (C) Je choisis l'honnêteté. (1 seconde)

  • ... et vous commencez votre réponse, calmement. (14 secondes se sont écoulées).

De la panique à la maîtrise : votre prochaine étape

Ce protocole P.R.O.C. est un outil. Et comme tout outil, sa valeur réside dans son utilisation. Vous ne pouvez pas espérer y penser pour la première fois le jour J, en pleine crise de panique.

La vraie différence entre le candidat qui échoue et celui qui réussit se fait à l'entraînement. Vous devez "muscler" votre Système 2.

Alors voici votre mission : dès aujourd'hui, dans vos révisions, dans vos oraux blancs, dans vos entraînements à l'écrit, entraînez-vous à appliquer la méthode P.R.O.C.

  • Dès que vous bloquez sur un exercice, ne regardez pas la correction. Appliquez P.R.O.C.

  • Demandez à un ami de vous poser des questions pièges. Appliquez P.R.O.C.

En faisant cela, vous ne préparez pas seulement un concours. Vous développez une compétence fondamentale pour votre future carrière de cadre dans la fonction publique : la capacité à rester lucide, analytique et maître de soi sous la pression.

Et vous, quelle est la question piège que vous redoutez le plus à l'oral ? Mettez-la en commentaire, et essayons ensemble d'y appliquer la méthode P.R.O.C.


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